Histoire de Madagascar

Protohistoire et histoire du peuplement

L’île de Madagascar semble n’avoir été occupée par l’homme que très tardivement, autour du début de notre ère. Tout permet de penser que les premiers découvreurs étaient des navigateurs originaires de l’actuelle Indonésie . Plus précisément, du sud de l’île de Bornéo ou Kalimantan où on trouve toujours pratiquées par les peuples daya de l’intérieur (comme notamment les Ma’anyan), des langues étroitement apparentées à celles parlées à Madagascar. Cette navigation des peuples malayo-polynésiens (ou nusantariens ) dans l’ océan Indien représente le pendant occidental d’un vaste mouvement de populations commencé depuis au moins le troisième millénaire avant notre ère dans l’ océan Pacifique . Elle fut rendue possible grâce une maîtrise précoce de l’art de la navigation, caractérisée notamment par l’utilisation des vaisseaux multicoques et des embarcations à balanciers. D’après les sources chinoises remontant aux premiers siècles de notre ère, les plus grands de ces vaisseaux pouvaient transporter un millier de passagers et des centaines de tonnes de marchandises. Ces premiers occupants asiatiques de Madagascar maîtrisaient la métallurgie , y compris celle du fer, la riziculture et le tissage de la soie . Outre le riz , ils transportaient avec eux nombre de plantes cultigènes d’Asie du Sud-Est comme notamment la banane , le cocotier , l’ igname , le taro , la canne à sucre .

Il semble également que ces navigateurs indonésiens aient possédé des établissements sur les côtes africaines où commençaient à pénétrer des populations bantoues , venues de l’intérieur du continent. On a pu alors émettre l’hypothèse que l’introduction des plantes asiatiques a joué un rôle important dans l’explosion démographique à l’origine de cette expansion bantoue .

L’histoire de Madagascar durant le premier millénaire de notre ère nous est encore très mal connue. On peut seulement supposer que l’île joua un rôle important dans le commerce, notamment des épices , entre l’ Asie du Sud-Est et le Moyen-Orient , directement ou via les côtes africaines. Le commerce des esclaves n’en fut pas non plus absent puisque d’une part, on trouve mention de la présence d’esclaves africains (zenj ou zandj) transportés par des Indonésiens en Chine au VII e siècle , et de l’autre, Madagascar même commença à connaître une africanisation de sa population. Cette présence africaine dans l’île ne semble cependant devenir massive qu’à partir du IX e siècle , sous l’impulsion du commerce musulman. Avec en effet l’arrivée de l’ islam , les Arabes supplantent rapidement les Indonésiens des côtes africaines et ne manquent ensuite d’étendre leur contrôle sur les îles Comores et certaines parties des côtes de Madagascar. Parallèlement, sous la concurrence conjointe des nouvelles puissances maritimes chinoises ( Song ) et sud-indiennes ( Chola ), les thalassocraties indonésiennes connaissent un déclin rapide. Tout ceci entraîna l’isolement relatif de Madagascar qui ne fut plus fréquenté, de l’extérieur, que par les commerçants musulmans.

Les royaumes de Madagascar

C’est au cours des premiers siècles du second millénaire que semble véritablement se mettre en place les actuelles ethnies autochtones de Madagascar, avec leurs différences respectives. Les Merina comptent sans doute parmi les plus anciennement constitués puisque leurs plus anciens souverains dont les noms nous sont parvenus ( Andrianerinerina , Rapeto ) auraient régné aux environs du XII e siècle .

Les premiers Européens qui découvrent l’île en 1500 sont les Portugais, sous la conduite de Diego Diaz . Mais c’est surtout à partir du XVII e siècle que la présence européenne affecte de manière décisive le destin de l’île par l’introduction massive des armes à feu et le développement de la traite des esclaves . En 1665 , Louis XIV tient à faire de Madagascar la base avancée de la Compagnie française des Indes orientales . Il en résulte une augmentation des troubles et la mise en place de royaumes guerriers, fortement liés aux Européens, en particulier des pirates qui s’établissent dans de nombreuses régions. C’est notamment le cas du royaume sakalava , s’étendant sur la majeure partie du littoral occidental de l’île, sous l’égide des rois maroseraña , « aux nombreux ports ». Il en sera également de même sur la côte est de la confédération des Betsimisaraka , fondée au début du XVIII e siècle par Ratsimilaho dont le père était un pirate anglais.

Pendant ce temps, d’autres royaumes se développaient à l’intérieur des terres. Les plus importants d’entre eux étaient, dans la partie sud, les royaumes betsileo et dans la partie nord, ceux des Merina . Ces derniers sont définitivement unifiés au début du XIX e siècle par Andrianampoinimerina . Radama I er (régnant de 1810 - 1828 ), le fils et successeur de celui-ci ouvre son pays à l’influence européenne exercée principalement par les missions, et, grâce au soutien des Britanniques étend son autorité sur la majeure partie de l’île. C’est ainsi qu’à partir de 1817 , le royaume merina devient pour le monde extérieur, le royaume de Madagascar .

Le royaume de Madagascar

En dépit d’un repli d’une vingtaine d’années sous le règne de Ranavalona I re ( 1828 - 1861 ), l’impulsion donnée par Radama 1er le royaume de Madagascar poursuit sa transformation tout au long du XIX e siècle . A la tradition orale qui subsiste heureusement jusqu’à nos jours s’ajoute l’écriture (Radama lui méme apprends la lecture et l’écriture vers 1820 avec le sergent Robin) Un embryon d’ industrialisation se met en place à partir de 1835 sous la direction de Jean Laborde , produisant du savon, de la porcelaine , des outils en métaux, ainsi que des armes à feu (fusils, canons, etc.). En 1864 s’ouvre à Antananarivo le premier hôpital moderne et une école de médecine. Deux ans plus tard apparaissent les premiers journaux. Une revue scientifique en anglais ( Antananarivo Annual ) est même publiée à partir de 1875 . En 1894 , à la veille de l’établissement du pouvoir colonial, les écoles du royaume , dirigées par les missions majoritairement protestantes , sont fréquentées par plus de 200 000 élèves. A cette époque de partage du monde entre les impérialismes européens , l’angleterre accepte les prétentions de la France à exercer son influence sur madagascar et un traité d’alliance franco-malgache est signé le 17 décembre 1885 par la reine Ranavalona III. Des désaccords sur l’application de ce traité, servent de pretextes à l’invasion française de 1895 , qui ne rencontre d’abord que peu de résistance. L’autorité du Premier ministre Rainilaiarivony , au pouvoir depuis 1864 , est en effet devenue très impopulaire auprès de la population . l’intention des Français est d’abord d’établir un simple régime de protectorat , affectant surtout le contrôle de l’économie et les relations extérieures de l’île. Mais par la suite, l’éclatement de la résistance populaire des Menalamba et l’arrivée du général Gallieni chargé de “pacifier” le pays en 1896 conduisent à l’annexion et à l’exil de la Reine à alger.

La colonisation française et le mouvement nationaliste

La mission de “pacification ” du général Gallieni ( 1896 - 1905 ) s’exerce non sans brutalité . Au total, les conséquences de la répression se traduisent par la disparition d’environ 100 000 personnes, sur une population totale de moins de 3 millions d’habitants. Le calme revenu , Galliéni s’applique à réaliser sa “politique des races” , mettant en place dans les provinces des administrateurs locaux , en lieu et place de l’administration Mérina. L’esclavage est supprimé. Les autochtones, soumis au régime de l’ indigénat , perdent tout droit et toute représentation spécifique. Les écoles même subissent une francisation forcée et perdent une bonne partie de leurs effectifs. Par la suite, à partir surtout de 1901, le pouvoir colonial entame la « mise en valeur » de la nouvelle colonie, pour le profit des colons et de la métropole. Les voies de communication (routes, chemins de fer , canaux navigables) et l’agriculture se développent. Des ports modernes sont aménagés, etc.

Durant la Première Guerre mondiale , les autorités françaises mobilisent jusqu’à 40 000 combattants malgaches dont un cinquième tombe au combat. Parmi les survivants, certains étaient porteurs de la grippe espagnole qu’ils vont ensuite propager à Madagascar provoquant la disparition de plusieurs dizaines de milliers de personnes, en particulier sur les hautes terres dont une multitude de villages allaient être désertés. Entre temps apparut, en 1915, un premier mouvement de résistance, celui des VVS ( Vy Vato Sakelika ) qui subit aussitôt une violente répression. Ce mouvement nationaliste se développa ensuite vers la fin des années vingt sous l’impulsion de Ralaimongo et de Ravoahangy malgré la constance de la répression. En 1942, Madagascar est envahi par les troupes britanniques, ce qui achève de miner le prestige de la France aux yeux des indigènes, même si le pouvoir est remis aux représentants de la France libre en 1943.

À partir de 1946, le combat pour la restauration de l’indépendance est mené par le MDRM ( Mouvement démocratique de la rénovation malgache ), dirigé notamment par Raseta et Ravoahangy, deux leaders merinas qui deviennent les premiers députés malgaches de l’Assemblée constituante française. Pour le contrer, les Français encouragent le développement du PADESM ( Parti des déshérités de Madagascar ), un parti anti-indépendantiste regroupant uniquement les Mainti-enindreny et les Tanindrana ou Côtiers. L’éclatement de l’insurrection de 1947 est matée par une violente répression des autorités coloniales françaises entraînant la mort de 11 000 à 100 000 personnes (selon les sources) qui mènent ensuite les autorités françaises à dissoudre le MDRM, qu’elles accusent d’en être responsable.

Après leur défaite en Indochine en 1954 cependant, les Français sont obligés d’envisager la possibilité de l’accession de leurs autres colonies à l’indépendance. C’est ainsi que la loi-cadre , prévoyant le transfert du pouvoir exécutif aux autorités locales est mise en place en 1956. Ceci permet en juillet 1958 l’accès à la tête du gouvernement de Philibert Tsiranana , un ancien leader du PADESM, devenu député en 1956. Le 14 octobre de la même année, la République malgache est instituée par le pouvoir colonial, suivie le 26 juin 1960 de la proclamation de l’indépendance.

La République malgache

Sous la présidence de Philibert Tsiranana (1959-1972), les Français continuent à exercer un contrôle direct sur l’administration et l’armée de la nouvelle république, ainsi que sur les activités économiques et la vie culturelle. En 1972 cependant, la révolte des étudiants, massivement appuyée par les lycéens et le monde ouvrier de la province d’ Antananarivo aboutit à la chute du régime. Le général Ramanantsoa, chef de l’ état-major se voit confié par la rue les rênes du pouvoir. Mais celui-ci ne réussit pas à affermir son autorité et, confronté à l’aggravation des troubles et au risque d’éclatement du pays, préfère se retirer au début de 1975 en abandonnant le pouvoir aux mains du colonel Ratsimandrava, qui est assassiné au bout d’une semaine. Au terme enfin d’une instabilité de plusieurs mois, une conjuration militaire place à la tête de l’État le capitaine de corvette Didier Ratsiraka , qui avait en charge le ministère des Affaires Etrangères sous le gouvernement de Ramanantsoa.

Dès son accès au pouvoir, Ratsiraka proclame sa volonté d’instaurer un régime « révolutionnaire », proche du « bloc socialiste », sous l’égide d’une Deuxième République. De nombreux secteurs de l’économie sont ainsi nationalisés et un parti unique, l’AREMA (Avant-garde de la révolution Malgache) domine toute la vie politique. Découragés, les investisseurs se retirent, entraînant une dégradation rapide de l’activité économique et une aggravation de la paupérisation. Des troubles, chaque fois durement réprimés éclatent alors un peu partout, achevant de démoraliser la population. Au bout d’une quinzaine d’années de ce régime, Madagascar se retrouve parmi les pays les plus pauvres de la planète.

La résistance au régime ne devient véritablement efficace qu’au début des années 90, sous l’impulsion du mouvement Hery Velona (Forces Vives) qui réussit en février 1993 à faire tomber Ratsiraka. Le nouveau président, Albert Zafy , procède aussitôt à une libéralisation forcenée de toutes les institutions dans le cadre d’une Troisième République. Mais la situation, au lieu de s’améliorer se dégrade davantage encore. Les investisseurs boudent Madagascar, d’autant que le pouvoir même est paralysé par les intrigues entre les clans rivaux dominant le Parlement, sur fond de corruption généralisée. Tout ceci aboutit à la destitution de Zafy par la Haute Cour Constitutionnelle (HCC) le 5 septembre 1996, la gestion du pouvoir étant confiée en interim au Premier ministre Norbert Ratsirahonana .

Les nouvelles élections présidentielles qui se terminent le 31 janvier 1997 consacrent le retour de Didier Ratsiraka au pouvoir pour cinq ans. En 1998, celui-ci organise un référendum renforçant le pouvoir présidentiel tout en procédant à la mise en place des « provinces autonomes » qui demeurent en fait sous son contrôle direct.

Au terme de son mandat, Ratsiraka est de nouveau chassé du pouvoir: fin 2001, Marc Ravalomanana étant élu à la tête de la république de Madagascar aux élections présidentielles.