Questions à Sarah Takats
28 février 2006 : Article de l’Express de Mada
Voir l’original dans l’Express de Madagascar
Questions à Sarah Takats, Attachée politique à l’ambassade des Etats-Unis à Madagascar
• Qu’entend-on par trafic de personnes ?
- La plupart du temps, nous pensons que le trafic d’être humains concerne des personnes expédiées à l’étranger contre leur gré. Bien que cela puisse être le cas, le phénomène existe aussi à l’intérieur d’un pays, et il apparaît comme l’esclavage des temps modernes. Il implique toute forme d’exploitation des personnes et de violations des droits de l’homme.
• Comment se manifeste-t-il généralement ?
-Les formes graves de trafic ou de traite de personnes à l’intérieur d’un pays comprennent toujours le recrutement, l’hébergement, le transport, et la mise à disposition ou l’obtention d’une personne à des fins d’exploitation sexuelle ou d’exploitation de main-d’œuvre. La vente des victimes est souvent pratiquée entre organisations dans un pays, tandis qu’au niveau international, cette activité criminelle peut chevaucher des frontières.
• Quelles formes peut avoir la traite de personnes à Madagascar ?
- Le pays face se trouve à deux problèmes majeurs, à savoir le tourisme sexuel à l’égard des enfants, et la traite de personnes pour la main-d’œuvre. Des informations officieuses indiquent que les enfants issus des milieux ruraux sont l’objet des abus de trafiquants, les emmenant en ville pour y devenir des domestiques. Mais d’autres réseaux existent dans le recrutement de mineurs pour la prostitution ou pour le travail dans les carrières.
• La situation est-elle assez alarmante pour qu’un débat critique s’élève ?
- Il faut noter que Madagascar se trouvait, en 2004, au niveau 2 en matière de trafic de personnes, selon la notation du département d’Etat américain, autrement dit il fait partie des pays à problèmes. Toutefois, des actions sur le sujet n’ont pas commencé. Mais grâce aux initiatives du comité interministériel de lutte contre l’esclavage humain et la traite de personnes, mis en place en 2004, le pays a fait un grand effort et se trouve depuis juin 2005 au niveau 2 sans surveillance. Madagascar est, maintenant, considéré comme un leader dans la lutte contre le trafic de personnes.
• Comment le gouvernement américain a-t-il effectué de telles évaluations ?
- A travers des questions sur la prévention, la poursuite des gens engagés dans ce fléau et ainsi que sur la protection des victimes. L’Etat malgache a accompli des efforts dans ces trois domaines. C’est déjà un bon signe, par rapport à ce qui se passe dans d’autres pays.
• Pourtant, ces problèmes sont toujours évoqués dans les médias …
- C’est vrai que les articles parlent beaucoup de diverses formes de traite de personnes. C’est un service que les médias locaux peuvent apporter dans l’éradication de cette pratique condamnable. Pour que la lutte acquière des résultats, il faut que les gens soient conscients de la réalité, et ces articles, dénonçant des cas, aident les gens à mieux comprendre la situation.
• Pourquoi le gouvernement américain intervient-il dans la lutte contre ce trafic ?
- La traite de personnes fait partie du rapport qu’établit le département d’Etat. Les pays qui négligent ces problèmes peuvent subir des sanctions. Celles-ci concernent l’annulation de toute assistance américaine non humanitaire et non commerciale. Pour Madagascar, ses efforts ont bénéficié de 450 000 dollars d’aide allouée à la lutte contre le trafic de personnes.
• Quelles sont les mesures à prendre pour que la majorité de la population soit sensibilisée ?
- J’estime que nous sommes partis sur une bonne voie, à travers le partenariat entre l’Etat malgache et le gouvernement américain. Plusieurs projets de sensibilisation sont, de ce fait, en cours. Il est important de savoir que le trafic de personnes implique des enfants et des victimes malgaches. C‘est facile de convaincre des gens que cette pratique est inhumaine. Surtout quand il s’agit, en fait, de notre famille qui y est impliquée et en devient victime. Je pense que plus les gens comprennent le problème et la nature des cas dans le pays, plus la sensibilisation devient facile. Je souhaite que chacun y mette du sien afin d’obtenir des résultats tangibles.
Propos recueillis par Fanja Saholiarisoa